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L'invisible - 58 min. - 2006 - Hacked by Thanos Fz
la collection

POU Alex - France

 

- Titre : L’invisible
- Année : 2006
- Durée : 58 min.
- Données techniques :
support de tournage :
support de diffusion : DV
couleur, sonore
- Equipe :
Scénario, montage et réalisation : Alex Pou
Musique : Damien Cadio
son «voix-off» : Laurent Mathias
Textes : Mike Davis, Yona Friedman, Patrick Ourednik, Alex Pou
Musique additionnelle : Pino d’Angio «Ma quale idea» (1980-Flarenash/WEA)
Tourné en France et en Belgique
Acteur principal : Sharif Andoura
L’architecte ennuyeux : Guillaume Durieux

La vidéo l’invisible est un film de science-fiction.
Il retrace la vie d’un homme ayant vécu durant le XXème siècle. Cet homme est architecte et parle de ce point de vue. Il fait un constat subjectif du siècle passé.
Le scénario et le montage sont basés sur l’idée du film burlesque, le personnage principal comme figure est toujours silencieux, c’est la voix-off (celle de l’architecte) qui se charge de l’intrigue, du sens et du temps.

VOIX OFF

Je suis né en Europe, le jour où le physiologiste Adolphe Brown-Séquard annonce qu’il s’est injecté sous la peau un extrait aqueux de testicules broyés de chien et de cobaye. Il voulait retrouver des forces physiques et des capacités que l’âge avait atténué...

Je suis né le jour où le chirurgien Mathieu Jaboulay greffa un rein de porc dans le coude d’un malade atteint d’insuffisance rénale. Mathieu Jaboulay fit plusieurs autres expériences de ce type, et comme il aimait sa mère, il lui greffa un ovaire de guenon pour pallier les inconvénients de la ménopause. Toutes ces tentatives furent des échecs.

Au début du siècle, on croyait beaucoup au positivisme, aux nouvelles énergies, aux découvertes, à la biologie, à l’évolution des mammifères, à la psychologie et à la physique sociale.
Les savants jugeaient qu’en utilisant les connaissances nouvelles et les moyens que la science moderne mettait à la disposition de l’homme, on pourrait bonifier l’homme jusqu’à la perfection et édifier ainsi un nouveau monde plus rationnel et plus humain.
Alors, ce jour d’une humanité nouvelle, ce jour d’édification, je suis devenu architecte

Au début du siècle, on croyait beaucoup au futur. La science-fiction fit son apparition et beaucoup de gens voyait l’être humain comme une machine perfectible et non plus comme un corps divin.

L’eugénisme se répandit ainsi, étudiant les possibilités de perfectionner le genre humain.
Les eugénistes disaient qu’à côté des individus saints existaient également des individus inférieurs des individus qui ralentissaient l’évolution du genre humain. Ils proposèrent alors aux gouvernements en place de voter des lois permettant d’écarter de l’évolution du genre humain les porteurs d’une tare biologique.
Les eugénistes disaient que les individus inférieurs devaient êtres stérilisés pour éliminer la déficience et préserver l’intégrité du noyau. Ils disaient aussi qu’à titre d’exemple une personne alcoolique de sexe féminin de 83 ans aurait 894 descendants dont 67 délinquants récidivistes, 7 assassins, 181 prostituées, 142 mendiants, 40 fous, soit 437 éléments asociaux.

Ils ont calculé que ces 437 éléments asociaux coûteraient autant à la société que la construction de 140 immeubles locatifs.

Après avoir décidé que l’invention du verre devait être une «bonne chose», le premier génocide du XXe siècle eut lieu en 1915 quand un gouvernement A fit arrêter et fusiller préventivement 600 familles d’un peuple B vivant dans une de ses villes. Puis ce gouvernement A désarma et fusilla les soldats d’origine B qui servaient dans l’armée A. Le peuple B reçut l’ordre de quitter les villes et les villages A sous 24 ou 48 heures, enfin il y avait une échéance... après ce temps donné, l’armée A pris position aux portes des villes et quand les gens en sortirent, elle fusilla tous les hommes et envoya les femmes et les enfants en exil dans des régions désertiques de la Mésopotamie.

A un moment précis, il y a eu comme un besoin naturel et pourtant urgent de faire le point, de faire des images de ce qui s’était passé, de scanner tout ça. Ce fut un vrai travail, un travail tellement intense que ce fut même pour certains une manière d’exister, devenir des scanners, des enregistreurs qui permettraient à d’autres d’analyser, en somme, un vrai travail d’enquête. (Une enquête sans fin). Et puis, toutes ces images sont devenues pour moi des points de départ pour des scénarios, des architectures.

A cette époque, beaucoup voulaient faire table rase de l’ancien monde, l’espérance naïve et jouissive d’un temps neuf et lavé des espérances déçues naissait. Pourtant, devant ce chantier inconnu, de nouvelles angoisses apparaissaient : l’Europe comptait 25 % de femmes et 15 % d’hommes névrosés ; devant l’urgence à nommer ce mal inconnu, les journalistes l’appelaient la maladie du siècle. Dans les années 70, le nombre de dépressifs augmenta et à la fin du siècle, 1 européen sur 5 était atteint de névroses. L’augmentation de cette fatigue dépressive coïncida paradoxalement avec certains mots d’ordre libérateurs, et à l’heure de sortir des drames de la culpabilité et de l’obéissance, l’émancipation demandait à ceux qui la prônaient le devoir de la responsabilité et de l’action. Ces devoirs n’avaient malheureusement pas été pensés.
Un sentiment d’écrasement sur le présent envahissait alors les esprits et l’inconnu céda à la découverte effrayante du vide.
A cette époque, le nombre de docteurs, de psychiatres et psychologues augmenta aussi très rapidement, sans parler du nombre de livres, de revues et d’articles traitant du phénomène. Une seule chose les rassemblait, leur diagnostic : la dépression était un mécanisme de compensation face à un monde dans lequel la liberté individuelle ne représentait plus un idéal à atteindre, mais un douloureux obstacle à surmonter. Au "tout est possible" répondait le "rien n’est possible"
La névrose était l’angoisse de la transgression des interdits et la dépression l’angoisse du poids de la liberté.

En 1931, deux chirurgiens anglais réalisèrent la première greffe de visage - il s’agit de transplanter la face (peau, graisse, muscles, nerfs et veines) d’un cadavre sur une personne défigurée. L’histoire de cette opération n’a jamais permis de savoir si cette greffe fut un succès... Pourtant cette tentative fut capitale pour moi. Elle bouleversa et transforma ma façon de travailler. Ce jour-là, un Frankenstein était né d’une expérience ne s’inscrivant pas seulement dans un devoir scientifique mais à partir d’une volonté fictionnelle, romanesque. La science ne permettait donc plus seulement de retarder la mort mais de lui faire face, littéralement. L’architecture pouvait donc aussi avoir son Frankenstein à soi, selon l’idée que rien ne puisse finir sans prendre une multitude de formes. Je pensais alors que la forme finissait avec l’expérience, ce qui n’était pas une grande idée en soi, mais qui permettait à l’idée du Frankenstein de ne jamais mourir. Cette architecture Frankenstein progressa en parallèle avec les découvertes scientifiques de l’entre-deux guerre. Mais c’est surtout après le deuxième conflit que ses applications furent nécessaires. Le champ de ruines psychologique et matériel forçait son destin.

En 1938, le microbiologiste René Dubos prouva avec le docteur Avery que les bactéries ne libèrent leurs substances dévastatrices qu’en présence de l’ennemi, comme si une sorte d’intelligence les guidait ; ce qui les amena à observer que suite à une agression ; l’organisme ne se contente pas de rétablir la fixité perdue, il s’adapte, il se transforme pour se conserver.
Certains architectes utilisèrent entre autres ce postulat pour penser l’évolution urbanistique. Il devenait impossible pour certains de penser en termes généraux comme le faisait une architecture conservatrice qui persistait à reproduire des schémas éculés. Par exemple, l’architecture conservatrice transformait les choses pour les adapter à l’usage des hommes alors que certains essayaient de transformer la manière dont l’homme utilise les choses existantes.

L’architecture conservatrice, c’est Robinson Crusoé qui en bon représentant du colonialisme et pour sauvegarder ses habitudes et les routines de son comportement transforme et détruit son île pour qu’elle puisse ressembler à l’Angleterre.

L’architecture Frankenstein, ce sont les soldats japonais d’après-guerre cachés dans la jungle des dizaines d’années. N’étant pas des héros de littérature, ils ne cherchèrent qu’à survivre sans vouloir pour autant, préserver leurs habitudes. Ils se sont nourris de la jungle, ils ont habité la jungle, ils se sont transformés eux-mêmes. Les architectes se trouvaient donc à ce moment précis confronté à un dilemme : bâtir les ruines de leur histoire et être à tout jamais hanté par la perte ou construire des lieux adaptés à un nouveau langage de la survie.

C’est à Paris en 1970 que j’ai rencontré le théoricien et architecte Yona Friedman. Nous nous sommes beaucoup vus et parlé pendant quelques années. Yona élaborait sa théorie à la suite d’expériences très simples qu’il vivait : se promener dans une ville, manger à une terrasse, faire la queue à un guichet de banque, prendre le train, l’avion ou bien tout simplement parler avec quelqu’un. Toutes ces petites expériences apparemment très banales lui permettaient de faire des liens entre le fantasme et l’adaptation, l’artificiel et le naturel, l’ordre et la survie.
Un été en se promenant dans le quartier de Brighton près de Londres, nous discutions à battons rompus et pensions que la grande ville était finie. Il me faisait remarquer d’ailleurs que de plus en plus d’habitants de ces grandes villes s’organisaient comme ceux des bidonvilles en essayant de résoudre seuls leurs problèmes, en organisant des services que le gouvernement des villes n’était plus capable d’assurer. Nous imaginions des bidonvilles bourgeois à l’intérieur des grandes villes, basés sur de nouvelles règles, de nouvelles législations ; des bidonvilles fonctionnant sur les lacunes et avec les déchets de la ville.
Je me souviens que nous nous étions longuement penchés sur l’idée d’un système d’impôt qui, par exemple, pourrait être payé sous forme de service civil, ce qui accélérerait les décisions gouvernementales. Par exemple, nous avions calculé que dix jours de service civil par habitant dans une ville qui en compte dix millions correspondraient à environ 50 millions de jours de travail, c’est-à-dire autant que le travail annuel de 200.000 employés.
Ce jour-là, Yona eut beaucoup d’idées. Et en 1978, il écrivait son livre, l’architecture de survie.

C’est en 1942 que j’ai rencontré ma femme, c’était au cinéma «l’Alhambra». Avant le film, comme souvent, il y avait toujours des petits films de propagande. Je me réjouissais à chaque fois devant la simplicité de ces petits objets rhétoriques, devant leur simplicité ravageuse. Ce soir-là, nous vîmes ma femme et moi un petit film de Walter Ruttmann. C’était un film à la gloire des chars Panzer. Le montage de ce film était un pur exemple d’efficacité à l’instar des films hollywoodiens. Le monde est construit à l’image du film et non l’inverse. Rien ne trouble la mécanique des évènements. Il n’y a aucun moyen de lutter contre le film, il n’y a pas de sortie, pas d’entrée, nous sommes littéralement jetés dans l’action, il n’y a ni contexte, ni matériau sur lesquels le spectateur puisse accrocher sa critique, le film nous prend la main en nous disant : "oublie tout, c’est ça le cinéma !". Une fois à bord, le cinéma se charge de tout, nous prend en charge, nous en donne pour notre argent, il nous fait oublier cette pauvre réalité sans rythme sans montage et sans musique. Alors le char panzer n’est plus l’objet réel mais l’objet-aventure, l’objet-animal, l’objet-design, l’objet de tous le temps et de toutes les formes qui se charge de tout, qui nous prend en charge qui nous en donne pour notre argent... Le char n’est plus un char. Le char semble littéralement volé. Rien ne l’arrête, le paysage n’est plus qu’un décor, tout défile, les sapins forment une haie, la brume une fumée d’égout ; derrière le panzer, plus rien n’a de poids, le panzer flotte, il n’y a plus de ponts, plus de routes, plus de villes, ce n’est plus qu’une forme qui nous mène. Il n’y a plus rien. Plus rien derrière le panzer. Le panzer, c’est la liberté!

Quelques années plus tard, tout le monde avait acheté un char Panzer. Mais moi, j’étais parti à Los Angeles où je travaillais pour un nouvel ensemble de logements locatifs. J’étais sur une plage du sud de la baie de Santa Monica avec Aldous Huxley et Thomas Mann. Plongés dans une discussion sur Shakespeare, nous réalisons soudain que, aussi loin que nous pouvons porter notre regard, le sable est recouvert de formes blanchâtres qui ressemblent à des chenilles mortes.
En continuant notre marche, nous remarquerons que ce ne sont pas des chenilles, mais des millions de préservatifs usagers, des préservatifs rapportés par la houle après avoir étés évacués par le principal déversoir des égouts de la ville.
Quinze ans plus tard, à l’endroit où Huxley, Mann et moi avions cru voir des millions de chenilles mortes, des milliers de familles cette fois se baignent, les enfants y creusent des trous pour faire des barrages ou construire des châteaux, des milliers de corps huilés brunissent lentement au soleil.
Cet heureux dénouement est l’œuvre d’une merveille de la technologie moderne : la station d’épuration.

J’ai travaillé quelques années dans une station d’épuration quand je suis retourné en Europe.Une station d’épuration c’est un peu comme le paradis, les gens ont des habits blancs toujours nettoyés et frais, il n’y a pas de saleté, pas d’hygiène, parce qu’au départ tout est préparé, tout est propre et pur, tout est léger et fluide, comme un char «panzer», sans aucune pesanteur, on passe au-dessus de tout en flottant, il n’y a plus rien qui puisse nous heurter, tout est en dehors de nous-même et nous, nous sommes protégé, il n’y a plus rien...

Cette nuit, j’ai rêvé de ma femme. Nous étions enfants et nous jouions dans une maison faite de mousses colorées. Nous n’étions pas seuls, il y avait beaucoup d’autres enfants. A l’intérieur de cette maison qui devenait de plus en plus grande comme un paysage, des petits plongeoirs surmontaient une sorte de fosse, elle aussi en mousse, tout le monde s’y jetait, personne n’avait mal, c’était interminable, calme et magnifique. Puis le rêve s’est transformé en cauchemar, des scientifiques ont déboulé, ils tentaient des expériences douteuses. L’ambiance devenait chaotique et inquiétante, toutes les images se confondaient très rapidement, je distinguais à peine les actions. C’était une foule de personnages poussiéreux, monstrueux et figés, c’était un monde hybride et grotesque. Ma femme n’était plus là, les enfants non plus, j’avais disparu du rêve...

Quelqu’un parle à l’invisible. Il lui dit :

«Le concept général du village prévoit un centre à partir duquel s’étendent, à partir d’un espace vert, trois ailes d’habitations.
L’espace entre les ailes d’habitation se divise en espaces verts et constructions basses. Les véhicules et les piétons sont nettement séparés et de trouvent sur des niveaux différents.
Et enfin, la planification des espaces de jeux s’étend sur la totalité du village. Malgré l’existence de zones fortes, l’ensemble est expérimentable comme une structure cohérente, évidemment...
Alors... Les mesures de planification qui permettent d’intégrer les situations ludiques sont :
Premièrement - des structures d’objets - des tracés de chemin, des routes de liaisons, des signaux, enfin, tu vois...
Deuxièmement - l’organisation d’un centre de jeux d’art et puis troisièmement des structures d’animation réalisées par les pédagogues.

Alors, pour les aires de jeux matérialisées. Elles sont relativement abritées du village et sont entourées d’une butte d’un côté et d’un fossé de l’autre, logique. On a prévu du sable, des gravillons, de l’argile, des produits synthétiques entreposés dans des récipients. Bon et puis, autour d’un espace libre central sont groupés les jeux de mouvement...

Pour les terrains vagues, ils sont situés entre des zones plantées où l’on trouve des matériaux usagés bien sûr - véhicules, meubles, machines etc... - qui peuvent être démolis.Il y a aussi un mur multifonctionnel, un fossé de cailloux, une tour polyvalente, un réseau routier, des aires de jeux, différentes sortes de rives, un espace de transition, des matériaux bruts, des jets d’eau ET des fontaines.

Bon... Le facteur esthétique de la planification urbaine est important selon deux facteurs très différents : d’une part, en tant qu’enrichissement visuel sous forme d’art ; d’autre part, en tant que repère qualificatif de l’environnement bâti.
La planification des équipements intégrant l’art a lieu en général quand la construction est terminée ou lorsqu’elle est très avancée. Parfois on essaie de tourner le problème en appliquant l’esthétique aux formes de l’aire de jeux, l’art est alors mieux accepté car il n’est plus tout à fait sans motif, sans objectif, tu comprends? Donc la valeur esthétique qui est apportée par des objets est significative car elle est liée à un processus de communication et de plaisir. C’est en cela que l’on peut justifier l’esthétique, ça, c’et une vraie vision, tu vois? »

Je me souviens qu’en 1934, les communistes construisirent une réserve pour juifs et appelèrent tous les juifs à s’y installer. La réserve se trouvait aux frontières de la Chine dans la région de Kharabov. En hiver la température y descendait à -40° et les communistes disaient qu’il ne s’agissait pas d’une réserve mais d’une région autonome à administration interne où les juifs pouvaient vivre entre eux et avoir leur propre autonomie.

Après la deuxième guerre mondiale, tout était à refaire et la logique moderniste s’immisça dans la logique de reconstruction : construire vite, construire pour peu d’argent, reconstruire une image ressemblant à celle des nations vainqueurs. Pourtant la deuxième guerre mondiale n’était pas une guerre de nations comme l’était la première mais une guerre de civilisations. Et les gens comme les architectes pensaient en termes de nations, où chaque peuple avait ses traits spécifiques : les Anglais étaient pragmatiques, les Anglaises avaient de grands pieds, les Italiennes de gros seins et les Italiens étaient insouciants, les Allemands étaient rigoureux et n’avaient aucun sens de l’humour, les Irlandais buvaient beaucoup et les Écossais étaient de grands randonneurs, les Français étaient arrogants, les Grecs complexés, les tchèques étaient lâches, les Polonais buvaient beaucoup trop, les Italiens étaient bruyants, les Bulgares étaient attardés, les Espagnols étaient ténébreux et les hongrois prétentieux.

Après la deuxième guerre mondiale, les architectes devaient se faire à cette idée : Les constructions devenaient des usines à rêves. Le grand ON indéfini travaillait sur l’utopie d’un monde sans défaut ou tout le monde mesurait 1 mètre 83, un monde craignant le désordre industriel, un monde qui avait peur de la vitesse et de la lenteur, en fait, un monde qui voulait revivre son passé. C’est ce regret qui a totalement oublié l’aspect fictionnel de l’architecture. Il n’y avait plus qu’un seul mot d’ordre : fonctionnaliser.

Vouloir revivre, c’est idiot comme idée.

C’est à cette époque que le flux touristique et sa communication reprirent en charge l’histoire des lieux. Le sampling fit son apparition alors que le tourisme naissait, la deuxième guerre mondiale était définitivement terminée. L’inconnu n’existait plus. En somme, peu à peu l’espace médiatique se substituait à l’Histoire.

En 1960, on a construit des architectures en forme de barres, on les a appelées Ravel comme le musicien, Presov comme la région slovaque. Aprés de vastes problèmes d’isolation, de fuites d’eau, de parties communes dégradées, après un vieillissement accéléré des éléments de construction, les deux barres ont été détruites en 2004. Elles ont donc tenu 44 ans. La destruction de ces barres laissera la place à d’autres logements de facture néo-corbusienne, tels que les bons élèves l’apprennent dans les écoles d’architecture. On appellera sans doute ce quartier, le quartier Rodin comme le sculpteur ou «Panzer» comme le char...

Tout échanger, c’est le charme et la grandeur de la nature... comme quand le chirurgien Serge Veronoff pratiqua la première greffe officielle de testicules de chimpanzé à l’homme, dans l’espoir de l’humanifier au maximum, de le nettoyer de son humanité stagnante, de le rendre invisible...

 
 
 
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